quoi court dans les ciels
que filent les nuages de hauts vents
sinon le temps et la lumière
plus amples de jour en jour
on sait l’étendue
et la courbe des mondes
aux sillons tracés
dans les terres sans nom
quelques bois se courbent bas
au passage des trombes
çà et là on voit même
oeuvrer la fureur
et rien ne vient contrer briser
la passée nue d’un souffle
Archives d’Auteur: Jean-Yves Fick
en allées_74
en allées_ 73
le temps se fige — une glaise
au décours des eaux froides
aucune image un méandre
et le vent et les nuées
rien autre que l’hiver
ici qui s’accroche et les fers
partout dressés pour déchirer
les corps
on revient à soi le sommeil
entend et retrouve souffle
lave les yeux
un oiseau au point du jour
vocalise
il faut partir
en allées_72
quel le savoir sans un mot
que la main a saisi
puis laissé là pour ailleurs
dans le temps
cela respire dirait-on
parmi la pierraille rouge
et les terres vaines
égrenées de quel lent travail
des formes noires brèves
nues après l’hiver
les arbres en dormance
on sait désormais où aller
delà le vent on emporte
dedans soi le seul silence
en allées_71
on va dans la foule
autour cela danse et parle
les phrases sont brèves
et les voix crient
il n’y a plus de recours
pour sortir de la glue
le jour sue et piaffe et sue
mais soi
quelque chose est perdu
du souffle et de la parole
d’erre haute
seul ce rien se scelle
sans nom sans personne
on sait le poème ailleurs
en allées_70
quoi revient du temps où
vivre était ce simple geste
approcher la flamme frêle
du vieux journal froissé
sous le bois bien sec
refermer le foyer
dans le froid de l’aube
on fait chauffer l’eau
c’est nuit autour
on demeure ici
cela qui nous regarde
sans penser rien
la lumière étale
le jour point
en allées_69
ce sont des échos de voix
au droit de l’allée
sur un miroir d’eau noire
que disent ces ombres
elles adressent leurs suppliques
aux arbres dont le geste pauvre
encore nu dans la lumière
lance un appel mais vers qui
le soir allonge son pas
plus avant devant la nuit
l’air froid attend immobile
et la voûte obscure
et le clignotement lointain
pâle de premières étoiles
en allées_68
le vent toujours et l’hiver
plus loin la digue et le temps
au miroir du fleuve quels
chemins cela qui s’efface
la neige éparse ne couvre
que l’obscur de qui est
songe et mouvant et fracas
d’écume la chute d’eau
la lumière sans une ombre
remonte vers quelle source
que la falaise a celée
sur les roches ça et là
de rares branches s’éploient
vers ce rien de ciels
en allées_67
on va dans le bleu glacial
celui de plus hautes neiges
qui pourtant ne tombent pas
quelques plumes blanches flottent
au gré du vent la morsure
que porte le gel féroce
devient une autre douleur
les mains insensibles brûlent
les yeux pleurent en silence
un sillon de larmes creuse
le visage de qui cherche
sans jamais renoncer rien
de ce qui fut sa musique rythmique
le souffle continue vivre
le jour couleur de bitume
de l’une à l’autre saison
quelle lueur haute l’aube
la vie va à s’inventer
ici c’est une rosée
et là un simple brin d’herbe
puis vient le gel violent
insensé qui fige et fauche
l’instant à même la main
cesse le vivant n’est plus
qu’une eau lointaine et sa nuit
une encre obscure lancée
sur la toile que les astres
délavent jour après jour.
en allées_66
le mot neige tombe épars
çà et là dans le vent froid
le temps renoue les hivers
aux ciels blancs aux lointains noirs
on va l’entre-deux des mondes
comme sur une jetée
le flot du visible passe
où le fracas dit la roche
et puis delà quelque sable
la forme a changé déjà
son visage n’est plus là
ce que l’impromptu dessine
n’est ni le hasard ni l’autre
nom de tout ce qui est — songe